La conférence Earth System Governance débat d’un parlement mondial

25. avril 2012

La création d’un parlement mondial a fait l’objet d’un vif débat lors d’un panel d’experts organisé jeudi en parallèle à la conférence Earth System Governance se déroulant à Lund en Suède. Si la nécessité de renforcer la démocratie mondiale a fait consensus, l’opinion des participants à ce débat était partagée quant à savoir si la création d’un parlement mondial constitue ou non la meilleure approche.

Dans ses remarques préliminaires, Andreas Bummel, le coordinateur de la Campagne pour la création d’une Assemblée parlementaire auprès de l’ONU, a noté que le soutien politique apporté à la création d’un organe parlementaire onusien avait augmenté depuis les années 1990, mais que ce sujet avait été grandement négligé par la recherche universitaire. Selon M. Bummel, plus de 150 institutions parlementaires existent actuellement dans le monde entier, la plus perfectionnée étant le Parlement européen. Il a cependant ajouté qu’il n’existe aucun organe parlementaire officiel au sein des Nations Unies, ni dans aucune autre organisation internationale et intergouvernementale majeure.

Au début de son intervention, Frank Biermann, le président du projet Earth System Governance et professeur de sciences politiques à VU University, Amsterdam, a déclaré qu’il serait utile que la recherche universitaire se penche davantage sur la possibilité qu’ont les représentant élus de participer significativement à la

John Dryzek, Australie
Photo : CCAPNU

gouvernance mondiale, ainsi que sur la manière dont ils pourraient le faire. Il a noté que la contribution des structures de représentation à l’amélioration de la responsabilité et la légitimité du système mondial (deux sujets fondamentaux du projet Earth System) constituait un sujet d’étude particulièrement approprié. Faisant référence à un article récemment publié dans Science magazine par plus de 30 universitaires, M. Biermann a expliqué que l’adoption de davantage de mécanismes de vote à la majorité qualifié et de vote pondéré dans les organisations normatives internationales est de plus en plus reconnu comme étant bénéfique. À cet égard, l’instauration de systèmes de vote similaires au sein des organes parlementaires pourrait contribuer à cette tendance.

Selon John Dryzek, professeur de sciences politiques à l’Université nationale d’Australie, la création d’un parlement mondial ne serait logique que dans un contexte de construction d’un État mondial et doit être abandonnée. La démocratie, a-t-il déclaré, devrait être comprise dans un sens

Andrew Strauss, États-Unis
Photo : CCAPNU

plus large que l’organisation d’élections. L’institution parlementaire ne doit pas être extrapolée au niveau mondial car cela limiterait les autres options. De plus, selon lui, la Chine et les États-Unis, deux des plus importantes puissances mondiales, refuseraient de participer à un tel projet, pour différentes raisons. De la même manière, Jonathan Kuyper, doctorant sous la supervision de M. Dryzek, a invoqué le concept de sentier de dépendance pour argumenter qu’il ne serait pas possible de revenir sur la décision de créer un parlement mondial, cette institution ne laissant alors « aucune place à ses alternatives ».

Andrew Strauss, professeur de droit international à l’Université de Widener aux États-Unis, a avancé un solide argument en faveur d’un parlement mondial. D’après M. Strauss, la démocratie requiert une certaine forme de représentation institutionnelle. Il a expliqué que le fait que le système gouvernemental de toutes les démocraties du monde soit axé sur une assemblée ou un parlement élus n’était pas un hasard. Selon lui, un lien direct entre les citoyens du monde et les institutions de gouvernance mondiale serait établi par l’intermédiaire des représentants élus d’un parlement mondial. De plus, le système actuel de législation mondiale n’est pas fonctionnel puisque les États ont la possibilité de se désengager de tout accord. Selon M. Strauss, une assemblée parlementaire mondiale pourrait potentiellement exercer une pression politique et morale, empêchant ainsi dans une certaine mesure les pays d’ignorer le droit international.

Pendant trois jours, la conférence internationale de Lund a rassemblé plus de 200 chercheurs de plus de 30 pays, exerçant dans différentes disciplines du domaine des sciences sociales principalement, qui ont exploré diverses façons d’arriver à un système de gouvernance planétaire plus légitime, démocratique et responsable. Elle a vu se succéder 16 intervenants et 40 panels de discussion. Il s’agissait de la troisième conférence de ce type organisée par le projet Earth System Governance. La prochaine aura lieu en janvier 2013 à Tokyo.

Le panel d’expert qui s’est déroulé en parallèle de la conférence était conjointement organisé par le projet Earth System Governance et la Campagne pour la création d’une Assemblée parlementaire aux Nations Unies.

Image : panel de discussion sur un parlementa mondial, de gauche à droite : Ruben Zondervan, Andrew Strauss, Andreas Bummel, Frank Biermann et John Dryzek
Traduction : Clémentine Choubrac